40 ans après, pourquoi Les Goonies est toujours aussi culte
Warner Bros.

Trésor de l’enfance et joyau du cinéma des années 80, "Les Goonies" fête ses 40 ans ces jours-ci sans avoir pris une ride. Mais pourquoi le classique de Richard Donner parvient-il ainsi à garder cette aura exceptionnelle ? Tentative d'explication avec un fan : le réalisateur de Spider-Man, Jon Watts.

Bien sûr, il y a un trésor perdu, un pirate légendaire, une quête semée d'embûches et la musique entêtante de Cyndi Lauper pour envelopper tout ça. Mais Les Goonies ont quelque chose de plus que les autres. 40 ans après, le film réalisé par le regretté Richard Donner traverse les époques avec un statut à part chez les cinéphiles. Une aventure totalement emblématique de la grande ère Amblin des années 80, qui génère encore émerveillement et nostalgie. Les décennies passant, Mickey, Choco, Data et les autres jouissent toujours d'une cote unique auprès du public. Les gamins fascinés sont aujourd'hui des quadragénaires ou des quinquagénaires citant encore à l’envi le "bouffi bouffon" et "tu pues le gymnase !"

Une espèce d’aura immortelle semble accompagner la chasse à Willy le Borgne, comme un je-ne-sais-quoi inquantifiable, qu'on a demandé à Jon Watts d'analyser. Alors comment comprendre que Les Goonies soient toujours aussi cultes ?

40 ans après, pourquoi Les Goonies est toujours aussi culte
Warner Bros.

Né au début des années 1980, le réalisateur de la dernière trilogie Spider-Man du MCU est directement issu de cette génération "Sinok". Tandis qu’il grandissait au Canada, au milieu des champs, il regardait Les Goonies. Lui aussi. "Au point où quand on marchait dans la campagne, on priait pour tomber sur une carte au trésor ou, au moins, un début d'aventure", s’amuse Jon Watts, que Première a interrogé fin 2024 au moment de la sortie de sa série Skeleton Crew (sur Disney Plus). "J'avais envie que ma vie soit celle des Goonies. J’ai grandi avec ça en tête et ça m’a construit d’une certaine manière. Quand on regarde Les Goonies enfant, ça reste en nous !"

Tandis que le long métrage produit par Spielberg célèbre aujourd’hui son 40e anniversaire (il est sorti le 7 juin 1985 aux USA), nombreux sont les fans qui vont verser leur petite larme. Pour Watts, le secret du film réside simplement dans son casting. Et c’est Richard Donner lui-même qui lui avait révélé l’ingrédient magique de sa recette :

"J’ai pu en discuter un jour avec Richard Donner. Et il m’a confié ce truc génial. Il m’a dit : 'On ne caste pas un enfant pour jouer un rôle. On caste un enfant pour ce qu’il est.'"

40 ans après, pourquoi Les Goonies est toujours aussi culte
Warner Bros.

Le réalisateur des Goonies aimait en effet raconter ce souvenir qu’il avait gardé en tête. Lorsque la production du film a débuté – dès la première lecture du script écrit par Chris Columbus – Donner, Spielberg et les autres se sont assis avec les enfants et chacun a lu sa partie.

"Ils faisaient ça de manière très professionnelle… Mais tout semblait tomber à plat. Ça sonnait faux et Richard ne comprenait pas pourquoi", reprend Jon Watts. "Et puis peu de temps après, il a entendu la bande qui était réunie aux abords du plateau. Ils discutaient normalement entre eux, se parlaient de manière chaotique. Personne ne s’écoutait. C’était le bordel. Et c’est comme ça que sont les enfants en fait. C’est comme ça qu’ils parlent et c’est donc comme ça que ça devait sonner dans Les Goonies ! C’est ce qui fait tout le charme du film au final : ces enfants sont vrais !"

Les Goonies
Amblin

Le vrai trésor des Goonies est là. Chaque membre de la bande avait trouvé sa place. Sa vraie place. Sean Astin était vraiment ce timide leader sympathique. Corey Feldman était réellement ce frimeur à la langue bien pendue. Ke Huy Quan était concrètement cet enfant touche-à-tout issu de l’immigration. "Le casting, c’est toujours crucial dans la réussite d’un projet, mais encore plus quand les acteurs sont les personnages, pour ainsi dire", insiste Watts. "Tellement qu’on peut parfois tomber sur quelqu’un qui ne correspond pas au profil du script, qui ne matche pas le perso qu’on avait en tête, mais qui apporte quelque chose de plus. Alors il ne faut surtout pas hésiter à s’adapter et à remanier le scénario autour des personnalités qu’on a castées."

Une fois le casting peaufiné, l’aventure peut commencer. Et le simple fait d’avoir des enfants qui portent une aventure, "ça apporte un sentiment d’émerveillement permanent", explique le réalisateur. "Tout est nouveau pour eux, tout le temps. Donc ils sont ébahis par ce qu’ils découvrent derrière chaque porte. Et puis mettre des enfants en danger, ça apporte une dose de frisson supplémentaire. Ce péril apporte un vrai truc en plus. Les enfants ne vont pas toujours prendre la meilleure décision et faire le choix le plus logique. Parce qu’ils n’ont que 10 ans. Quand on a 10 ans, on peut foncer tête baissée vers la situation la plus dangereuse possible, sans même se poser la question."



Jon Watts explique ainsi que les films Amblin, d’une manière générale, sont des films faits autour de thématiques adultes, mais avec des enfants au casting. "Ils prenaient les enfants au sérieux, en les laissant prendre toute leur place dans une histoire avec de vrais enjeux et pas juste dans une histoire enfantine."

Alors pourquoi personne n’a vraiment réussi à reproduire la magie des Goonies, 40 ans plus tard ? Pour Watts, la réponse vient d’abord de l’évolution d’Hollywood et de la frilosité des studios face aux concepts originaux :

"Si vous allez voir un studio avec un script qui s’appelle Les Goonies, aujourd’hui, on va vous demander d’où ça vient. Est-ce que c’est tiré d’un comics ? D’un livre à succès ? Non ? Vous l’avez juste inventé ? Et là, ça va bloquer. Dans les années 1980, on pouvait imaginer une bande d’enfants que personne ne connaissait. Un film sans star, où les enfants sont les stars... Aujourd’hui, ce serait impossible à vendre."

Le constat est cinglant. D’ailleurs, à défaut d’inventer une nouvelle bande qui sache nous faire rêver à nouveau, Warner Bros. a décidé de lancer pour de bon le chantier de la suite. Mais rien ne dit que Les Goonies 2 saura retrouver cette alchimie fragile, ce mélange d’innocence, de chaos et de magie qui a fait du premier un trésor intemporel.